L’expérience autofictionnelle chez Doubrovsky et Beauvoir

Le jeu de mots lié à l’oxymoron "aveuglement lucide" que nous proposons dans ce livre nous permet de parler du genre de l’autofiction comme d’un vrai "aveuglement lucide", qui s’applique aussi au roman L’Invitée de Simone de Beauvoir. L’accomplissement de l’épigraphe hégélienne "Chaque conscience poursuit la mort de l’autre" devient dans ce roman un transformateur générique. Par sa fin, l’histoire racontée, qui porte d’ailleurs des traits autobiographiques, s’achève dans la pure fiction. La contrariété entre l’aveuglement et la lucidité forme ainsi un point de départ pour une discussion de ce que c'est le genre de l’autofiction. L’aveuglement devient critère premier de ce genre, en ce que Doubrovsky affirme que "l’écriture n’éclaire pas la tâche aveugle, elle se produit à partir d’elle". En mettant à l’envers l’oxymore "aveuglement lucide", nous réunissons Serge Doubrovsky et Georges Gusdorf par notre manière de traiter la marque générique de l’autofiction : "La vérité n’est pas un trésor caché, déjà là, et qu’il suffirait de mettre en lumière tel qu’il est".